LES EXTATIQUES 2021
LES EXTATIQUES 2021 : 7 sculptures de Jean-Bernard Métais sur la place Rodin / Scène musical de l’ile Seguin Boulogne Billancourt . Les Extatiques Juin 2021 au 3 octobre 2021
Vous auriez tort de penser qu’à la densité des premières statues de Gudea, le Prince de Lagash, voici plus de 4000 ans, a celle des grands kouros grecs voici bientôt 2600 ans ou qu’à l’intensité concentrée du Balzac de Rodin s’opposeraient des oeuvres fluides, traversées par l’atmosphères, ou animées jusqu’à la dissolution par des matières qui s’en écoulent. Vous auriez tort car la démarche de Jean Bernard Métais n’est pas d’opposer le fluide au massif mais plutôt de montrer qu’en suivant l’arc du temps ses oeuvres ne sont que l’accomplissement des formes solides, comme la glace n’est qu’un autre état de l’eau.
Si longtemps la présence affirmée de l’oeuvre dans l’espace, l’effet de sa masse, la qualité de son déploiement, l’insistance de son aura, fut la question historique de la sculpture, ce qui anime les recherches de Jean Bernard Métais est plutôt d’inventer des objets qui auraient la capacité d’incorporer
des énergies à l’oeuvre, permettant ainsi de visualiser les métamorphoses incessantes des choses. C’est ainsi que, par exemple, dans le miroir d’un sablier immense, l’envers du plan montre le sable qui, mis en mouvement, agit sur sa forme, et y creuse au fur et à mesure de son épuisement des rimes, sortes de contre-formes, comme si la désagrégation du volume en s’accomplissant révélait un pentacle dont la géométrie serait le sortilège. Le regard est alors retenu, fasciné par le spectacle des transformations simultanées du sable, qui en changeant de plan se liquéfie, bâtit des pyramides ou écrit des mots selon une nécessité soigneusement calculée par l’artiste. Bien sûr, sans que l’esprit ait besoin de le formuler, le sable dit le temps et recueille les évènements géologiques, les vies animales, végétales dont l’arène n’est que le dépôt avant que ses grains ne s’accolent à nouveau et entreprennent par cette concaténation un nouveau cycle qui démentira le titre que l’artiste donne à ces temps impartis puisque, chacun d’entre eux, déclos justement le cercle du temps.
des énergies à l’oeuvre, permettant ainsi de visualiser les métamorphoses incessantes des choses. C’est ainsi que, par exemple, dans le miroir d’un sablier immense, l’envers du plan montre le sable qui, mis en mouvement, agit sur sa forme, et y creuse au fur et à mesure de son épuisement des rimes, sortes de contre-formes, comme si la désagrégation du volume en s’accomplissant révélait un pentacle dont la géométrie serait le sortilège. Le regard est alors retenu, fasciné par le spectacle des transformations simultanées du sable, qui en changeant de plan se liquéfie, bâtit des pyramides ou écrit des mots selon une nécessité soigneusement calculée par l’artiste. Bien sûr, sans que l’esprit ait besoin de le formuler, le sable dit le temps et recueille les évènements géologiques, les vies animales, végétales dont l’arène n’est que le dépôt avant que ses grains ne s’accolent à nouveau et entreprennent par cette concaténation un nouveau cycle qui démentira le titre que l’artiste donne à ces temps impartis puisque, chacun d’entre eux, déclos justement le cercle du temps.
Les sculptures de Jean Bernard Métais ne sont jamais séparées du monde, car leur question n’est pas celle de leur unité refermée dans le silence de la pierre ou du bronze mais au contraire leur dialogue avec l’ouvert. Le métal alvéolé associe ses couleurs aux changements du ciel et des nuages et la sculpture qui peut prendre la forme d’un abri, comme le passe muraille au Luxembourg, n’est qu’une résille divisée en deux quartiers qui, en laissant paraître le paysage quand on s’y protège, révèle que la séparation serait la seule menace. Le corps, tramé par les projections de lumière et d’ombre que font glisser sur lui les mouvements du soleil et des nuages coordonne l’humain a son contexte comme si ce lien était l’ultime asile.
Le lien, il est, oui, celui de l’objet et du cosmos ou celui de l’individu à son histoire ou à ses contemporains et, qu’elle s’accomplisse dans son reflet sur l’eau comme la sculpture bicéphale de Djurong en Chine ou dans les mots de la population comme le grand obélisque de Valencienne, l’oeuvre n’agit que parce qu’elle est reliée et qu’elle peut ainsi manifester le spectacle des mutations en cours, celles de l’esprit comme celles de la nature. Fragiles, parfois frêles comme le gréement d’un navire, mais réglées pour saisir toutes les oscillations des phénomènes, ces sculptures, parfois gonflées comme des yourtes mais agitées par la lumière et le vent, souvent dressées comme des vigies, attentives telles les antennes alertes d’un insecte, ces oeuvres, offertes au cosmos, disponibles à ses forces et confiantes en leur force observent pour nous et transmettent l’activité du monde sensible. En impulsant ainsi le graphe de l’activité infatigable de la nature, elles nous relient et parfois nous soulèvent. C’est ainsi que le Fort Lambert repose son éperon séculaire sur les ondes du temps, trouvant dans ce mouvement un souffle qui l’agite comme une poitrine gonflée par l’effort. Il est là, il est une architecture, il sera du sable, il est dans le grand cycle, il est en vie.
Jean de Loisy, directeur du Palais de Tokyo (2019)
crédit photo: Martin Argyroglo, JB Métais
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